L’histoire du Tango ( Acte 5 )

Les années 1940 à 1955 représentent l’âge d’or du tango. Un épanouissement dans les trois arts : musique, poésie et danse qui constituent le tango.

Économiquement, l’Argentine sort de la récession et entre politiquement dans la présidence de Peron. Les salles de bals et orchestres d’envergure se multiplient. La fin des années 1940 compte six cents orchestres qui œuvrent principalement dans Buenos Aires (pour cinq millions d’habitants). On danse même sur des terrains dédiés habituellement au sport. Par exemple, en 1941, la piste couverte de Boca Junior accueillera quinze mille couples !

Au bal, la succession des œuvres se pratique dès lors comme actuellement : sur des tangos, des milongas et des valses. La rythmique et le tempo des danses se diversifient et s’accélèrent. La posture des danseurs change : ils se rapprochent et l’abrazo devient plus serré. La femme se place face à l’homme d’où l’apparition du croisé. La recherche d’intériorité – associée au style milonguero où les partenaires sont collés – apparaîtra au début des années 1950 vers la fin de l’âge d’or du tango.

Voici des noms clés de chefs d’orchestres célèbres :

Annibal Troïlo, Francisco Canaro, Juan d’Arienzo, Carlos di Sarli, Alfredo de Angelis, Osvaldo Pugliese, Roberto Firpo, Horacio Salgan, Osvaldo Fresedo… Cette période de l’âge d’or du tango voit également une magnificence de la poésie tanguera souvent peu prise en compte par le danseur. Pourtant la beauté de ces textes devrait aussi nourrir une danse plus expressive. Tout au moins éviter des contresens comme la prolifération de figures complexes sur le thème du deuil par exemple.

Voici un aperçu de poètes incontournables :

Alfredo Le Pera (parolier choisi en 1932 par Carlos Gardel) peut être considéré comme le premier à mettre à la portée du public international une poésie tanguera de qualité. Les thèmes récurrents seront les sentiments de nostalgie, déchéance, perte, absence, trahison (de l’amour, du faubourg de jeunesse…) dans les pièces comme (Volver, Soledad, Mi Buenos Aires querido)

José Gonzales Castillo et son fils Catulo Castillo apporteront les lettres de noblesse littéraire à la poésie tanguera. Des figures de style de la poésie « cultivée » imageront ces sentiments de nostalgie et décriront avec finesse les drames intimes (Silbando, Maria). Homero Manzi pourrait être qualifié de parolier romantique. Il joue avec les métaphores et le principe d’accumulation de mots pour suggérer l’atmosphère du faubourg comme dans Barrio de tango. Enrique Cadicamo mettra en scène les mondes nocturnes, intimistes, de la luxure ou de la nature, avec un vocabulaire choisi (Nostagias). Enrique Santos Discépolo paraît original, à part. Homme de théâtre, expert dans l’expression des sentiments, sa prose offrira sa grande sensibilité ou un humour grinçant jusqu’au grotesque (Cambalache, confesion). Il aimera aussi être en décalé par rapport aux thèmes-clichés habituels (où par exemple dans Victoria !, l’homme abandonné exulte, enfin libéré d’une épouse détestée).

Malheureusement, ces quinze années de prospérité déclineront à partir de 1955, suite au début des instabilités politiques. © Contenu protégé.

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